Je ne laisse jamais pleurer mon bébé !

Ça a longtemps été ma devise. Laisser pleurer un bébé ? Moi ? JAMAIS ! Non, mais quelle idée… Et pourtant, on a essayé de me faire croire que « ce n’est pas si grave », que « ses poumons se feront plus rapidement », que « sa voix se développe ainsi ».

Oui, on me l’a dit. J’ai « presque » failli le croire, quand j’avais 21 ans et que je venais d’accoucher de mon premier bébé. Je ne crois pas que les poumons se forment avec les pleurs, mais il est certain que mon cerveau s’est endurci avec ce genre d’âneries.

Alors, j’ai expérimenté avec Abd Allah, le « one mother, no cry » (merci Bobby, tu dois te retourner dans ta tombe, je te présente mes respects.) et figure-toi que ça marchait vachement. De toutes manières, je ne vois pas comment j’aurai pu faire autrement. Enceinte de mon second, je me suis fait le serment de me boucher les oreilles aux inepties, et de continuer à materner au maximum : porter, allaiter, bisouiller et câliner sans avoir besoin de laisser mon bébé montrer une petite larme. Elyess a été un bébé porté 24/24, mais tranquille, calme, souriant, comme son grand frère. Comme sa petite soeur, deux ans plus tard.

Mais voilà que Mohammed est rentré dans ma vie, et m’a complètement retournée. Mes principes n’ont pas changé sur ce point-là. A peine né, en peau-à-peau pendant de longues heures, en cododo forcément… SUR le sein. Nous sommes rentrés de la maternité, le lendemain de la naissance, bien sûr dans le sling… qu’il n’a plus lâché. Normal.

Normal aussi, la tétée dès qu’il ouvre les yeux, les bisous et les câlins à profusion. Normal, sa petite main dans la mienne pendant son sommeil, dans mon lit à nos côtés. Normal, les siestes au creux de moi, roulé en boule dans l’écharpe… Tout indiquait que le chemin emprunté serait le même que celui de ses aînés.

Puis est arrivée une période très dure. Une période que je n’ai pas connu avec les trois plus grands. Un tsunami qui m’a mise à terre. Mohammed s’est mis à pleurer. Mais pas juste des chouinements. De gros pleurs que je n’arrivais pas à qualifier. Il hurlait. Douleurs? Malaises? Je n’ai jamais su. Ce que j’ai su, c’est que j’étais complètement désemparée. Complètement à l’ouest. J’essayais de l’allaiter : il pleurait de plus belles. Je le portais en écharpe : il se calmait un peu, s’endormait pendant quelques minutes, et se réveillait en hurlant. J’ai essayé un bain : aussitôt mis dans l’eau, aussitôt ressorti ; les hurlements redoublaient. Ses pleurs, couplés aux miens, je regardais mon petit amour s’égosiller sans pouvoir agir. J’imaginais ce que pouvaient penser les voisins et ça me faisait encore plus frémir.

Ah, j’en ai passé des heures avec mon petit bout dans l’écharpe, hurlant, et moi, le caressant, lui parlant, lui récitant du Coran, arpentant mon appartement… A toutes heures du jour… et de la nuit. Oui, j’en ai passé des heures à culpabiliser…

Ma plus grosse crainte était les douleurs qu’il pourrait ressentir en pleurant ainsi : migraines, maux de gorge et autre…

Et quand sa grosse crise de larmes était passée, il s’endormait directement. Il posait sa tête contre ma poitrine, et POUF il tombait dans le sommeil.

J’ai un peu fouillé sur internet pour savoir de quoi il s’agissait : coliques ? pleurs de décharge ? Je suis même allée jusqu’à envisager certains syndromes…

Puis… du jour au lendemain, plus rien. Mohammed se réveille en souriant et le reste. Il s’endort en tétouillant (mon sein… car après avoir pris son pouce quelques semaines, il l’a lâché) dans l’écharpe. J’ai appris à repérer quand lui donner le sein (attention… si je le propose trop tôt, c’est parti pour une crise ! et si je le propose trop tard… C’est trop tard !), j’ai appris à voir ses signes.

Aujourd’hui, je ne le laisse plus pleurer. Sauf quand je prends le volant… il déteste la voiture… quand je n’ai pas le choix, je n’ai pas le choix. Je minimise au maximum les trajets en voiture, ce n’est pas plus mal.

Jamais je ne laisse un bébé pleurer. Mais par moment, j’ai été dépassée. C’était malgré moi… Je ne laisse pas mon bébé pleurer. Et aujourd’hui, j’apprécie ses sourires, et ses rires, son bavardage et son bavouillage.

La culpabilité ne nous quittera, en réalité, jamais. Quoiqu’on fasse. Je continuerai à materner en écoutant mon coeur… et le sien.

14 commentaires

  1. linemourey · janvier 26, 2017

    Article très touchant ! Un bébé qui pleure n’est pas forcément un bébé malheureux. Les pleurs sont aussi un moyen de communiquer, d’exprimer ses désirs (faim, fatigue, malade, …) avant que maman anticipe tout, tout de suite. Un bébé qui pleure est un bébé qui va bien aussi, il comprend qu’il ne fait pas qu’un avec sa maman, il devient une personne à part entière, il apprend à différer ses pulsions, à jouer avec la frustration, à développer son imagination. Bref, il s’adapte et apprend la vie !
    Ne culpabilisez plus, vos enfants semblent heureux et apaisés !
    http://la-parenthese-psy.com/

    • Salwa · janvier 26, 2017

      Certainement. Mais il y a une différence entre un bébé qui pleure et un bébé qu’on laisse pleurer.
      Très personnellement… cela se voit du premier coup d’oeil, mon bébé est beaucoup mieux depuis qu’il ne pleure plus 😉
      Donc je ne crois pas trop à la théorie « tous les bébés doivent pleurer c’est bon pour eux. » Non.
      Quand on observe un bébé il a mille façons de s’exprimer et communiquer avec ses parents autre que les pleurs. Et j’en ai eu la preuve avec mes aînés et j’en ai la preuve avec mon dernier en ce moment même.
      Les pleurs expriment une souffrance. Rien d’autre. Et un besoin irrépressible d’y mettre fin. Et cela, se fait en maternant le maximum.

      Mais je conçois que certains bébés ont des pleurs de décharge… et doivent être accompagnés pendant ces crises. Ne surtout pas les laisser à leur triste sort sous leur larmes.

      Enfin… nous sommes tous plus heureux sans pleurs.

      • linemourey · janvier 28, 2017

        Bonjour, je viens de prendre connaissance de vos commentaires (mahdiyabel inclue, bonjour !).
        Je ne parlais pas dans mon commentaire de « pleurs qu’on laisse s’éterniser ». Laisser pleurer un enfant seul n’a aucun sens éducatif de mon point de vue, et crée de l’angoisse inutile chez l’enfant. Je parle des pleurs en général, de fatigue, d’énervement, de douleur etc… Ceux là, si on écoute le bébé, qu’on lui explique ce qu’il ressent n’ont rien de négatifs bien au contraire. On explique au bébé ses émotions, c’est à dire on transforme des éléments (des émotions brutes) qu’il ne comprends pas toujours et on lui redonne dans une manière qui lui est plus assimilable. C’est ce que Bion développe dans ses théories d’éléments alpha et beta et souligne le rôle essentiel des parents pour traduire des éléments bruts non compréhensibles. Puis anticiper tous les besoins de l’enfant, avant qu’il puisse l’exprimer (de la manière dont il le souhaite) fait qu’on est un parent « trop bon ». L’enfant ne ressent donc pas le manque qui est nécessaire pour sa construction. Ce manque permet, entre autre, d’aider l’enfant à comprendre qu’il est séparé de sa mère. C’est le stade du miroir, et il arrive autour des 8 mois il me semble. Bien entendu, l’expression ne passe pas que par des pleurs ! Une maman comprend par plusieurs manières quand son enfant à faim, à sommeil, etc… Les pleurs restent aussi un moyen d’expression, et pas forcément de souffrance. Ce que je souhaite souligner dans mes commentaires, c’est certains pleurs sont bénéfiques et qu’il ne faut pas qu’ils deviennent angoissants pour les parents. 🙂

        • mahdiyabel · janvier 30, 2017

          Bonjour. Linemourey.

          Oui ce que vous dites est juste encore une fois, mais ne s’applique pas à un nouveaux né, cela s’applique à un bébé plus grand, passé une année au moins. Pour ce qui est de la séparation mère enfant, en fait vers 8 mois l’enfant comprend seulement qu’il est séparé physiquement de sa mère, mais il ne comprend pas encore la notion d’individualité, il est donc encore fusionné à elle et n’est pas en capacité de comprendre qu’il à une individualité propre. Il n’as donc pas la capacité intelectuelle et émotionelle de différer ses besoins, ni de comprendre la différence entre désirs et besoin, d’ailleur ce qu’il exprime alors ne sont pas encore des désirs mais de réels besoins. Il ne peut pas non plus comprendre qu’on ne réponde pas à ses besoins, il va juste ressentir un manque ni plus ni moins.

          Toutes ses capacités, et donc l’intérêt d’expliquer à l’enfants les raisons de ses pleurs, ses sentiments etc sera assimilable par le bébé au alentour de 2 ans, mais bien sûr chez certains ce seras 16 ou 18 mois et d’autre 24 ou 30 …

          Pour conclure ce que j’affirme est issus d’explications sur la psychologie infantile et basé sur les récentes découvertes en neuroscience.

    • mahdiyabel · janvier 27, 2017

      Bonjour,

      Ce que vous décrivez est juste, mais l’enfant n’est vraiment capable de différer ses pulsions et comprendre qu’il ne fait pas qu’un avec sa mère que vers 2 ans.

      • mahdiyabel · janvier 27, 2017

        PS : Neïla ce n’était pas seulement des pleurs de décharge, en fait elle ne savait s’exprimer et ne sais s’exprimer que dans l’éxcès soit elle hurlait soit elle éclatait de rire ! Pas de nuances lol !

        Younes à des pleurs de décharge je crois, le soir juste avant de partir pour la nuit il pleurs un coups, pas longtemps, tout contre moi puis s’endors !

        En tous cas el hamdulilah que ton petit prince se soit apaisé !

  2. Maman BCBG · janvier 27, 2017

    Ah c’est difficile au début, on est prise entre notre « instinct »: prendre le petit qui pleure, et les « bons » conseils de l’entourage: « mais tu vas l’habituer aux bras! » (m’enfin, il a 3 jours heu….)
    Au final mieux vaut écouter son intuition 🙂 même s’il y a des moments ou entendre pleurer son bébé non stop alors qu’on fais tout pour le soulager peut être super éprouvant… j’ai souvenir d’une ou deux fois où à bout de force j’ai posé mon fils dans son petit lit pour aller pleurer sous la douche, là où je ne pouvais plus entendre ses cris… quelques minutes de « calme » pour laisser redescendre la pression, alors que je me sentais à deux doigts de craquer et de lui hurler dessus…
    A part ça, je ne l’ai jamais laissé vraiment pleurer, et aujourd’hui c’est un petit garçon très indépendant capable de jouer ou lire longuement dans sa chambre…

    Je pense qu’au contraire, plus un enfant est rassuré de savoir que sa maman et son papa (oui parce que heureusement les papas sont là aussi pour câliner et rassurer le bébé!…enfin quand ils ne sont pas au boulot quoi…)sont là pour lui, plus cela lui donne l’assurance de se tourner vers le monde 🙂

    Ça a été plus dure pour la deuxième, car quand les deux hurlent ensemble, on découvre qu’on a pas 4 mains… ^^’

  3. mahdiyabel · janvier 27, 2017

    Salam aleykoum.Ce que tu décrit me fait penser à Neïla bébé … Peut être Mohamed est il un BABI ? Si jamais tu voudras qu’on discute de ça un jours n »hésite pas … Neïla était un bébé si spécial, je m’en suis d’autant plus rendu compte avec Meïssane et là encore avec Younes je le vois bien … Elle était un bébé pas comme les autres, elle est une petite fille pas tout à fait comme les autres ! Bébé, elle hurlait, au point que les voisin 2 maisons plus loin l’entendait alors qu’elle n’avait que quelques mois, pourtant je maternait …comme toi j’ai fait des killometres avec elle dans l’echarpe. elle ne pleurait pas tout le temps mais quand elle pleurait c’était intense !

  4. dzmaman · janvier 28, 2017

    Ah oui je suis ok avec toi, je ne laisse jamais un pti ange pleurer. C’est inhumain presque contre le sens même du maternage. Un bébé qui pleure sa me fond le cœur, je prend tt de suite mon enfant dans mes bras j’essaie de savoir ce qu’il a, faim couches souillé, fatigue et envie de dormir, je lui parle sans qu’il me quitte. Je ne l’ai pas porter 9 mois en moi pour le laisser ensuite pleurer pour qu’il fait sa voix ou je ne sais qu’elle autre foutaises j’ai entendu. Un mère avec un vrai instinct maternel ne laissera jamais son petit bébé pleurer.

  5. plume rouillée · février 9, 2017

    C’est tellement dur quand ils pleurent sans qu’on comprenne pourquoi ou qu’on puisse faire quelque chose…
    En te lisant, j’ai l’impression que tu sens coupable du fait que ton bébé ait beaucoup pleuré… mais pour moi, tu ne l’a pas laisser pleurer. Il a pleuré, tu l’a accompagné, tu a chercher, bercé, écouter, et il a continuer à pleurer, mais tu ne l’a pas laisser seul à ses pleurs…Parfois, on est impuissant face à bébé qui pleure, que ce soit des douleurs, ou une angoisse, on ne peut le vivre à sa place, on ne peut qu’être là pour lui… et c’est déjà beaucoup! Tu as fait un travail formidable en accompagnant ton bébé. Dans cette situation se sentir dépassée, physiquement et mentalement, à bout de patience, désarmée, ce n’est pas un signe de faiblesse, c’est juste normal 🙂 Et tu malgrès tout tu a garder le cap du maternage : je trouve que tu peux être fière de ce que tu as fais.

    J’ai eu un bébé qui pleurait beaucoup aussi, il avait un gros reflux pour lequel on a mis un certains avant d’avoir un traitement efficace (« mais oui, madame, c’est normal qu’il régurgite et qu’il pleure  » hum… sous traitement, il ne pleure pas, et dort plus de 20 mn d’affilé, c’est quand même un signe…). Et je me souviens des jours, des nuits, où on se relayait avec son père, pour bercer, bercer sans fin dans l’écharpe ou les bras, les longues berceuse où tu finis pas lui chanter le contenu des étagères de la cuisine à bout d’inspiration, les nuits où il pleure deux vraies heures entières… ( et ici, avec un gros REF, l’allaitement n’était pas non plus le truc miracle, il acceptais uniquement s’il avait faim). Des nuits où je ne savais même plus déchiffré ses pleurs, où je finissais par lui dire :  » je ne sais pas ce qui ne va pas, mais je suis là, je t’écoute ». Et puis parfois aussi, quand j’étais seule dans la journée, je le posais une minute dans son lit, pour reprendre mon souffle, retrouver le minimum de… je ne sais pas quoi, mais pour pouvoir continuer.
    Cette expérience me rend aussi méfiante sur l’étiquette « BABI », qu’on aurait très pu appliqué à mon fils, bébé tonique, avec un grand besoin de contact, qui ne calme que contre son parent, change d’activité toutes les trentes secondes (on se retourne sur le tapis- pleure pour les bras- se contorsionne pour rejoindre le sol- se retourne- pleure pour les bras, etc..). Oui, sauf que le problème de mon fils, c’était le reflux. Il avait mal, il était inconfortable. Il avait besoin du contact pour s’apaiser, et il était bien plus confortable à la verticale. Et autour de moi, bien des bébé déclaré babi se sont révéler avoir un reflux ou des mots de ventre dû à une intolérance…

  6. Virginie · février 13, 2017

    Bonjour Salwa, juste un petit mot pour vous remercier pour vos écrits, qui m’ont beaucoup touchée et m’ont renvoyée pour la plupart à ce que j’ai vécu et je vis encore avec mes 2 enfants.
    Je ne suis pas de votre religion mais l’amour maternel est universel et nous aimons toutes nos enfants de la même façon. Je suis également une « maternante », et il est vrai que je fonctionne à l’instinct aujourd’hui, après avoir tenté d’écouter les « mauvais » conseils de mon pédiatre dans les premiers temps…
    J’allaite un petit qui aura bientôt 2 ans et j’avoue que la perspective d’un sevrage non naturel, me stressait au plus haut point et me serrait le cœur jour après jour. Heureusement que je suis « tombée » sur votre article sur l’allaitement long et les autres aussi. Ils m’ont confortée dans mes choix, et m’ont réconfortée car je ne suis pas la seule à me poser ces questions et à vivre ces émotions…
    Lors que je regarde mon aîné qui a 6 ans, je suis nostalgique de ces moments ou il n’était qu’un bébé. Mais je suis également fière de ce qu’il est devenu aujourd’hui.
    Mon dernier de 2 ans, je le vois grandir aussi chaque jour et mon cœur de maman se serre de voir qu’il n’est plus un bébé. Mais c’est la vie, et grâce à votre blog, je sais que je ne suis pas la seule à passer par ce genre d’émotions.
    Alors juste merci…

    Virginie

    • Salwa · février 14, 2017

      Bonsoir Virginie,
      et merci énormément pour ton joli message. Cela me pousse à ne pas laisser tomber ce blog qui se fait de plus en plus rarement nourrir en matière d’articles. J’ai parfois l’impression d’avoir fait le tour de la question.
      Mais en lisant ton commentaire, je vois qu’il est encore lu et apprécié des mamans, quel plaisir. Peu importe que nous ne soyons pas de la même religion, nous trouvons des choses en commun qui nous touchent 🙂
      Bravo pour ton maternage et l’amour que tu donnes à tes enfants.
      Bonne continuation à toi, au plaisir de te relire par ici.
      Bises

      Salwa

  7. suzanne35blog · février 14, 2017

    je n’ai jamais voulu laisser pleurer mes bébés non plus! maintenant je suis grand mère..

  8. emilieoumkalthoum · février 14, 2017

    Assalam aleykom

    En te lisant j’ai aussi pensé au RGO : tu t’es renseignée ?

    Et sachant que ta fille était intolérante aux PLV, tu as essayé une éviction là aussi ?

    Alhamdolillah que ça aille mieux en tout cas. Tu es une maman merveilleuse ma sha Allah. Qu’Allah vous préserve toi et ta famille. Amine

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